Prose

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X L’âme, la psyché comme clairière spirituelle, comme éclaircie de l’Être

Cet émerveillement devant le mystère de la création comme devant les choses les plus simples, dans les cafés, dans les magasins, sur les marchés ou dans ma propre maison était ce qui m’aidait à vivre. Finalement, me disais-je, il y avait de la beauté partout, il suffisait de la voir. Mais les êtres normaux, ceux qui pensaient surtout en termes d’utilité et d’efficacité pensaient que chaque chose devait être à sa place, pour remplir son rôle de chose comme chaque individu n’avait de raison d’être que par sa fonction sociale et leur regard glissait sur l’arbre, le fleuve, la fleur, la barque parce qu’ils s’occupaient de choses bien plus sérieuses.

Qu’était-ce qu’une chose, par exemple un saule au bord d’un fleuve ? Il différait selon les conceptions de chacun : pour le promeneur, il permettait de s’abriter de la pluie et de l’orage, pour l’écrivain, il était l’occasion de songer mélancoliquement à l’écoulement irréversible du temps, pour le botaniste, c’était un arbre de la famille des Salicacées, pour le menuisier c’était une matière première, un stock de bois disponible mais pour le poète, c’était une belle nymphe aux longs cheveux, c’était Mélisande qui pleurait près de la fontaine, c’était la Lorelei qui par amour se jetait dans le Rhin, c’était Ophélie trahie par Hamlet et qui mourait de chagrin noyée ou encore dans les « Sonnets à Orphée » de Rilke l’objet d’une écoute attentive et silencieuse et le signe d’une métamorphose augurale par son apparition dans le chant :

Là s’élevait un Arbre ! O pur dépassement !
O chant d’Orphée ! O arbre haut à l’Oreille !
Et tout se tut. Pourtant même dans la réserve
Procéda un nouveau commencement, signe et mouvement.

Pour le philosophe Heidegger le rôle essentiel de la chose, de la Ding an sich, n’était pas à interpréter en termes de causalité et à l’appui, il citait le poète Angelus Silesius :

La rose est sans cause, elle fleurit parce qu’elle fleurit
Ne désire être contemplée, n’a d’elle-même souci

Quel était le rapport entre toutes ces conceptions ? Elles différaient comme celle des philosophes qui faisaient de Dieu une cause suprême (causa prima) et celle des poètes comme Angelus Silesius qui faisaient de Dieu un Rien qui n’était pas un pur Néant, un « nihil » qui n’était pas une négation, un non étant qui illuminait le cœur de chaque chose comme la lumière qui lançait des éclairs dans la rivière. Pourquoi celle-ci nous éblouissait-elle, pourquoi fallait-il détourner les yeux ? Pourquoi le soleil ne se pouvait-il regarder en face ?
Pour le scientifique, la lumière demeurait une énigme malgré les découvertes d’Einstein quant à sa nature double, composée à la fois de photons et d’ondes électromagnétiques. Pour les Grecs, c’était le logos qui apportait un éclairage sur les choses, qui faisait apparaître l’être des choses. Pour le philosophe des Lumières, la lumière naturelle de la raison précédait la perception de la lumière extérieure, elle en était la condition de possibilité. Pour Heidegger, c’était la clairière (allemand « Lichtung ») ou plus exactement « l’éclaircie » de la psyché, du Dasein qui était la condition de possibilité de la lumière naturelle. L’éclaircie, la clairière c’était le
« noûs »? L’esprit qui percevait, était irradié par la lumière divine, spirituelle, sacrée.
Mais la Lumière divine comme le disaient la religion chrétienne et les Grecs c’était aussi la visibilité du Verbe, il faudrait dire plutôt sa lisibilité. En filigrane y étaient tracées des lettres colorées, a bleu saphir, e bleu pâle, i rouge rubis, o bleu saphir, u vert émeraude, un peu comme dans le sonnet des voyelles de Rimbaud. Prier c’était contempler ces chiffres, lire ces symboles que comprenaient les livres sacrés de Dieu. Ces caractères tracés dans la lumière émanaient de l’Etre qui en était la source obscure et claire tout à la fois, l’origine mystérieuse. Toutes les œuvres de l’Esprit étaient rassemblées là, dans les rayons du soleil et des autres étoiles et l’Être auréolait de sa lumière les poèmes savamment amassés en eux tandis que leur métamorphose en caractères colorés en faisait des livres vivants, des manuscrits en lettres de feu.
Lorsque le Poète contemplait cette lumière, lorsqu’il opérait ce revirement du regard dans la nature secrète des choses, il percevait une lueur si intense, si aveuglante qu’à première vue, il ne distinguait rien et ce n’est que peu à peu qu’il finissait par apercevoir l’éclatante beauté de l’Être et sa textualité. Cette perception n’était pas à proprement parler un savoir, une connaissance mais une mystique. C’était un regard tourné vers l’Être et non vers l’étant. Vers cette donation première - un peu comme le chef d’orchestre donne la mesure - ce mystère originel, ce miracle premier, ce « il y a » qu’évoquait Rimbaud dans les « Illuminations » :

« Au bois il y a un oiseau, son chant vous arrête et vous fait rougir. Il y a une horloge qui ne sonne pas. Il y a une fondrière avec un nid de bêtes blanches »

auquel faisait écho comme un chant voisin et apparenté le « De profundis » de Georg Trakl :

« Il y a un toit de chaume où tombe une pluie noire,
Il y a un arbre brun qui se dresse solitaire,
Un vent qui murmure autour de masures vides
Ô comme est triste ce soir ! »

Ce « il y a » dont Leibniz disait dans les « Principes de la nature et de la grâce » qu’il était la question fondamentale de la philosophie : « Pourquoi y a-t-il quelque chose et pas rien ? ». Foyer lumineux, cette source abondante de vie aveuglait à force d’intensité et de rayonnement, était soustraite au regard, à l’œil qui selon Plotin était pourtant d’essence solaire comme lui en vertu du principe qui veut que le semblable soit connu par le semblable. La flamme était dans le regard comme le regard dans la flamme. La flamme c’était le feu de Dieu qui était de nature solaire comme la plus haute divinité des anciens Egyptiens et elle se réfléchissait dans l’œil tel un papillon qui se brûle les ailes à la mèche d’une bougie, se tourne, s’oriente vers la lumière. La nuit nous engloutissait mais la possibilité demeurait de trouver dans la contemplation des reflets de la lumière divine au cœur de ce monde la satisfaction d’un besoin de l’âme, la réalisation de notre plus intime désir.
Cette lumière était une métaphore traditionnelle dans les textes et la poésie mystiques pour désigner l’"amor Dei" qui éclairait l’âme plongée dans la nuit spirituelle. Dans une de ses visions, Sainte-Thérèse d’Avila voyait apparaître les mains et le visage, le corps glorieux du Christ transfiguré :
« Ce n’est pas un éclat qui éblouit, dit-elle, mais une blancheur douce, un éclat infus qui enchante suprêmement la vue sans la fatiguer, de même que la clarté dans laquelle on perçoit cette si divine beauté. Cette lumière diffère tellement de celle d’ici-bas, la clarté du soleil semble si terne, comparée à la lumineuse clarté qui se présente à notre vue qu’on ne voudrait plus jamais ouvrir les yeux. C’est comme une eau très claire qui coule sur du cristal en reflétant le soleil, comparée à une eau très trouble qui coule sur la terre sous de gros nuages. Elle ne représente pourtant pas le soleil, et sa lumière n’est pas comme celle du soleil ; on dirait une lumière naturelle, tandis que l’autre est artificielle. C’est une lumière qui n’a point de nuit, rien ne la trouble, car elle n’est que lumière. Enfin, la personne la plus intelligente pourrait passer sa vie à imaginer cette lumière qu’elle n’y parviendrait point… »
La lumière dans ce texte n’était pas la lumière physique, onde ou corpuscule, mais la lumière mystérieuse, éclatante, infuse (qui s’oppose à diffuse et signifie intérieure) de Dieu et elle n’était pas vue d’après Thérèse avec les yeux du corps mais avec ceux de l’âme, c’était une lumière ineffable, impossible à décrire sans recourir à des images d’eau, de cristal et de soleil c’est-à-dire de transparence, de diaphanéité et de miroitement, quelque chose d’indicible par sa beauté.
Dans la poésie de Saint-Jean de la Croix, carme déchaux comme Sainte-Thérèse, on trouvait aussi l’image du feu notamment dans le poème « Flamme d’amour vive », pour suggérer la vérité de l’Être :

« Ô lampes de feu
Aux splendeurs desquelles
Les profondes cavernes du sens
Qui était obscur et aveugle
Avec d’étranges excellences
Chaleur et lumière ensemble donnent à leur aimé »

Mais cette lumière elle-même provenait d’une source qui, elle, demeurait voilée, en retrait, occultée comme dans le poème « Je sais bien moi la fontaine » :


« Je sais bien moi la fontaine qui coule et court
Malgré la nuit

Son origine je ne la sais car elle n’en a
Mais je sais que toute origine vient d’elle
Malgré la nuit

…

Sa clarté jamais n’est obscurcie
Et je sais que toute lumière d’elle est venue
Malgré la nuit »

C’était d'une source qu'émanait la lumière, en elle il y avait encore de l'obscurité et de la pénombre et elle illuminait la
« caverne » de l’âme - image où l’allégorie de Platon était encore présente - qui sans le secours divin n’était que ténèbres et nuit profonde.
C’était encore à des sensations de lumière que faisait allusion Proust lorsqu’ heurtant les pavés de la cour des Guermantes il était ébloui par la montée en lui de la mémoire involontaire :

« La différence, purement matérielle, était dans les images évoquées ; un azur profond enivrait mes yeux, des impressions de fraîcheur, d’éblouissante lumière tournoyaient près de moi et, dans mon désir de les saisir, sans oser plus bouger que quand je goûtais la saveur de la madeleine en tâchant de faire parvenir jusqu’à moi ce qu’elle me rappelait, je restais, quitte à faire rire la foule innombrable des wattmen, à tituber comme j’avais fait tout à l’heure, un pied sur le pavé plus élevé, l’autre pied sur le pavé plus bas ».

L’extase dont il était ici question n’était pas infuse comme chez les mystiques mais tout entière temporelle. Elle plongeait le regard dans les profondeurs du souvenir tout en s’élançant vers l’avenir du texte écrit, vers les délices et les tortures infinies de la littérature pour laquelle la joie qu’il avait ressentie avait fait comprendre au narrateur qu’il avait une authentique vocation.
La lumière des mystiques qui n’était plus qu’indicible clarté n’était pas la lumière grecque dans laquelle subsistait toujours une part d’ombre puisque, comme le disait Héraclite, « ce qu’a de plus propre la nature c’est de se retirer » ("physis kruptestai philei" . L’Etre ne se dévoilait pas entièrement, la lumière n’apparaissait pleinement qu’à travers la pénombre, les ténèbres faisant ressortir en le menant jusqu’à sa dimension la plus propre l’éclat de l’or, la noirceur de la nuit étant mise en relief et comme épaissie par la lumineuse clarté de la flamme ou de la lampe. La lumière et les ténèbres en réalité n’étaient point distincts, n’y ayant entre les deux qu’une différence d’intensité. Dans le « Traité de la peinture », Léonard de Vinci parlait d’une différence de degré :

« Or le premier degré de l’ombre, ce sont les ténèbres, et le dernier la lumière ; tu feras donc peintre, l’ombre la plus noire près de sa cause, et que son extrémité se convertisse en lumière, c’est-à-dire qu’elle paraisse sans limites »

C’était l’unité du jour et de la nuit dont parlait Héraclite dont la différence s’abolissait au regard de l’unité du ciel qui en était la dimension d’apparition, l’espace de visibilité mais aussi au regard de l’unité profonde de la lumière et des ténèbres qui trouvait sa correspondance picturale dans les tableaux de Georges de la Tour..
La flamme mystique enveloppée d’ombre et de nuit profonde que contemple la Madeleine pénitente de Georges de La Tour dans une méditation sur la mort et la vanité des choses terrestres ou plutôt son reflet dans le miroir, comme une image de son âme qui va s’éteindre, et qui rend son visage et son corsage d’une blancheur diaphane et presque irréelle, l’opposition des bruns, des ocres, des noirs avec l’éclat quasi surnaturel de la chandelle et de la lumière qu’elle projette sur le personnage tenant une tête de mort entre ses mains, autrement dit le clair-obscur n’est que la métaphore de l’harmonie, trouée de lumière sur un fond d’obscurité et de ténèbres, vérité qui fait rayonner tout ce qui l’entoure de son diadème de pierreries brillantes comme le diamant, de sa rivière d’émeraudes et de perles nacrées, de sa parure de rubis mais dont l’incommensurable éclat n’apparaît que dans l’obscur.
J’avais toujours été éblouie par les lumières qui brillaient dans l’obscurité : dans le tendre velours de la nuit se dévoilaient, dans le déshabillé de leur apparition, le bouton d’or de la lampe ou les diamants du lustre qui scintillaient à la fenêtre, j’écarquillais mes yeux, j’étais en extase devant ces lueurs qui flamboyaient à une distance proche ou lointaine, telle l’auréole d’un saint ou le fond d’or des primitifs italiens et des icônes, et que la pénombre faisait surgir dans toute leur splendeur de pierres précieuses au coeur des ténèbres ou d’enluminures dans un livre d’heures. Ou bien j’éprouvais une émotion incessamment renouvelée devant les vitrines illuminées des magasins lorsque, tel un enfant qui découvrait ses cadeaux au pied de l’arbre ou comme le papillon qu’aimantait la lumière, elles se découvraient à moi dans toute l’étrangeté de leur brillance d’astres nocturnes qui luisaient au firmament tel l’éclair zébrant le ciel un soir d’orage. Pour moi ces lueurs dans l’ombre, ce clair-obscur étaient bien l’image sensible de la vérité qui était toujours occultée, enfouie, cachée au regard du profane, que l’œuvre d’art seule permettait de mettre à jour et dont le dévoilement n’était jamais « le monde de la pleine lumière » dans la mesure où son caractère sacré restait à jamais celé, enfoui, abrité dans l’enclos de la nuit profonde et la crypte du silence. On n’approchait jamais de ce mystère de l’Être sans une sorte de terreur et de fascination à la fois, sans risquer de sombrer dans la folie.

Claire d'Orée

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-Je t’aime trop.

-Moi pas.

- Ah bon ? Et pourquoi cela ?

-Et bien parce que je n’aime pas cette notion d’excès, de débordement. En t’aimant je n’ai l’impression de ne dépasser aucune limite. Aimer trop c’est reconnaître l’idée « populaire » qu’il y a une petite raison pour chaque chose, que les sentiments aussi doivent se conformer à des règles. Par exemple, quand je dis « je veux » je mets ma tête à prix. Quand je dis « je t’aime trop », je nous condamne, je reconnais là le délit de ne pas aimer comme on aime (trop) l’entendre. Aimer trop, c’est aimer sous le poids de la crainte, c’est commettre un « crime »."Trop" c'est l'abcès de l'esprit. « Trop » signifie que la raison est dépassée, que les tiroirs débordent, vomissent le petit papier des sentiments. « Aimer trop » signifie aimer d’une manière qu’un certain public s’accorde à montrer du doigt. C’est comme aimé, en société. Moi je t’aime très.

-Tu m’aimes très ? En quoi est-ce différent ?

-Le « très » de l’infini, parce que tu mérites cette notion d’éternité. Je t’aime « très » de ma petite manière à moi, rien d’autre. 

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Tu pourras boire en amont ou en aval, les petites eaux claires feront ton salut, impardonnables. Elles n'ont aucun maître, me sont fidèles, et rien ne pourra t'épargner la punition terrible, pas même l'ébranleur du sol qui s'élance "envagué" derrière ses bêtes brunes.


Tu seras alors frère de l'agneau unique , celui qui jadis connut une mort sanglante avant même que l'an de sa naissance ne soit passé. Il n'y aura pas assez de mères en ce monde pour t'abreuver de vie quand le cours se terminera là où commencera ta perte.

Puisque les fontaines de tes secrets sont Arcadie , toutes au monde , semblables, et que la fureur règne en moi comme un soleil ardent, tes minces murmures finiront en Enfer. Les eaux emporteront la vie, volée de tes lèvres corrompues, assoiffées, pour les emmener jusqu'aux portes de mon monde, et bien plus loin encore.

Là où les plus vils désirs s'enlacent , avec une passion morte, tu connaîtras alors ma fureur . Mon oeil sera ton seul et unique spectateur, pleurant la perte qui sera mienne.

Et j'irai prendre un verre au Bar du Léthé

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- L'eau est froide. J'ai froid.
Ça me fait chier !
Tu me fais chier il me fait chier elle me fait chier vous me faites tous chier !
Je t'emmerde.
Est-ce que je te fais chier ? J'suis égocentrique et je t'emmerde
Un narcissisme égoïste surdimensionné
Comme ta grosse tête !
Comme les flammes prêtent à noyer chaque combustible aux alentours

L'avalanche aveugle et blanche qui noircit à mesure de ses rencontres pour finir bien bas en tas de merde

Un tsunami dont l'eau est puisée dans les profondeurs d'un océan opaque et paisible purifiant au passage les corps de leurs âmes
Je comprends pas je comprends rien putain j'suis vide
Je suis pas fou les gens sont fous pas moi je suis pas fou les gens normaux ou pas moi je ne suis pas fou

- …

- J'ai pas besoin de toi j'ai pas besoin d'eux j'ai pas besoin de… je n'ai besoin de rien je ne suis rien alors tout va bien

- ...

- Je squatte le grenier de ma tête j'ai froid
Mon corps empêche mon âme de toucher le monde putain !
Toujours ce besoin fou de me retrouver sous l'eau
Je suis un poisson de baignoire

Un poisson de baignoire pas de mer
Le grenier et le vieux bois craquent sous le vent
Pas moi
Moi je m'en vole dans la pièce avec la poussière du grenier qui forme une ceinture greniétale
Des étoiles grisâtres dans le grenier
Le bruit des vagues des poissons des coraux du vent qui tripote cette salope de mer leur gémissements et toutes ces conneries des mers m'empêchent de penser
Baignoire pas la mer
Pas la mer
Recouvert d'eau comme par la terre dans mon cercueil à ciel ouvert c'est là que...
Putain mais qu'est ce que t'as !?
Ne cherches pas à savoir qui je suis
Pourquoi devoir toujours obligatoirement toujours devoir être
Je parle de lui à la première personne
Il parle de moi il me je le il
Je ne suis ni il est, voilà
Ne cherche pas
Moi même cherche plus
Demande au puits asséché dans un village abandonné depuis peu ou depuis des millénaires où ni lune ni soleil ne flirtent dénudé d'étoiles avec cette putain de lumière aveuglante qui m'explose les entrailles qui je suis
Demande le lui il se mettra à crier avec un bourdonnement strident à t'aveugler ton inconscience

Grenier froid et morose
Je m'y éclate
Les cafards aussi m'ont abandonné
Ça joue du piano dans le rez de chaussez
Putain d'égotiste d'un putain d'égoïsme surdimensionné.
J'emmerde et c'est tout ce que je sais faire
Il faut dire que je le fais bien
Vous retiendrez au moins ça de moi
Un emmerdeur emmerdé
Ou ne retenez rien oubliez
Vous le faite bien aussi
J'emmerde vos règles
J'emmerde vos silences et vos mots que vous même ne comprenez pas merde

Ça se rapproche ça se rapproche
Souriez ?

Vous me jugez hein vous me jugez jugez j'emmerde vos jugements
On est tous des putains de crevures
Moi pas plus que vous…Sauf que moi je suis juste sonné juste encore sonné du réveil brutale de mon accouchement enfoiré de docteur et puis merde pourquoi il a fallut qu'ils me réveillent conasses d'infirmières au sourire plein d'hypocrisie

C'est pas que j'aime pas les femmes,
J'aime trop mon putain de petit corps fétiche et moisit que je ne veux pas le prêter
Et j'emmerde les hommes
A la limite les enfants que j'emmerde aussi mais ils puent moins la vie
Sentiments à la con
J'aime trop mon ombre pour la lâcher pour qu'elle soit piétinée par autre que moi
Qu'elle soit piétinée par un tas d'os qui cliquette bourré d'alcool parfumé de chez Chanel


Putain

Je suis seul vide face à lui
Le miroir me fait chier ils sont beaucoup trop pour ce miroir du grenier
Moi j'y suis pas

- …

- Je vois pas la porte
Pourquoi y a pas de porte ?
T'as mis où la porte ?
Elle est où la porte ?

L'eau est froide j'ai froid
Elle est froide merde ça me fait chier !
On me fait chié vous me faites tous chier !
Je t'emmerde.
Je te fais chier je sais faire ça (oui) je suis égocentrique et je t'emmerde
Un égoïsme surdimensionné
Comme ta grosse tête !
J'comprends pas j'comprends rien putain j'suis pas vide
L'horizon bloque ma vue
Je suis pas fou les gens sont fous pas moi je suis pas fou les gens normaux ou pas moi je ne suis pas fou

Recouvert d'eau comme par la terre dans mon cercueil à ciel ouvert c'est là que...c'est là que mon âme s'est mise à me parler

C'est là que la baignoire s'est mise à gonfler

Ses mots coulaient en sanglot

Criblé d'une pluie noire en cataracte d'une pluvieuse nuit d'automne




Violon

Je prends la route vers les lisières du vide
Blanc et noirâtre.

Grince, gémis...violon, gémis... chante moi l'aria des anges déchus...
Il est l'heure que tu m'emportes dans la brume




Qu'est ce que vous faites !?
Qui vous a...!?

 

- ...

 

- Je savais... qu'il arriverai un jour où elle me trahirai

Je... savais

Je suis resté figé

J'aurai du sceller cette serrure

Je savais

Mon âme nue je suis resté figé


Je ne vous ai pas invité pas demandé de voir.


Ne regardez pas dans la serrure de mon grenier vous y verrez ce que vous ne devez pas voir

 

 

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VIII Saint-François d’Assise et les oiseaux

J’étais émerveillée aussi par la fragile beauté des petits moineaux, qui dans leur humble robe de bure brunâtre striée de noir comme celle du Poverello qui, dit-on, parlait leur langage, venaient picorer à ma table de petites miettes de pain ! Leur stratégie d’approche et de recul, d’avancée et d’esquive, leur peur d’être pris comme des garnements qui chapardent des bonbons dans un magasin, leur retour à l’assaut dans une obstination farouche, m’émouvait comme la simplicité des petits enfants lorsqu’ils tournent autour d’un manège et rient à gorge déployée en tentant d’attraper un anneau ou une peluche ou une poupée de chiffon et l’attention, le sérieux qu’ils mettent dans le jeu, leurs efforts réitérés même s’ils ne sont pas couronnés de succès est l’image même de la vie, les adultes ne jouant qu’à des jeux plus dangereux, plus risqués dans lesquels ils doivent faire preuve de tout leur courage, de toute leur intelligence, de toute leur volonté.

Les oiseaux éveillaient en moi le sentiment de la beauté par la liberté avec laquelle ils fendaient l’espace à toutes profondeurs vers des horizons lointains, par leurs chants et par leurs couleurs. C’étaient pour moi des créatures harmonieuses par leur goût de l’infini et leur sens de la musique et parce qu’ils apportaient au monde une touche de beauté. Lorsque je m’éveillais, je voyais parfois sur le rebord de ma fenêtre deux colombes particulièrement gracieuses, l’une, ce devait être le roi, était entièrement noire avec une encolure verte et mauve tandis que la reine à la robe entièrement blanche était maculée de taches roses et jaunes. Ils étaient splendides ces oiseaux, comme un prince et une princesse de la couronne dont la démarche souveraine et le dédain, conformément à leur rang, de toute nourriture, que leurs sujets, au contraire, à la manière des petits moineaux, avalent gloutonnement, sans se soucier de leur laisser quelques restes, éveillaient mon admiration. Ces oiseaux étalaient sous le regard, comme sur un éventail les figures colorées, la palette de leurs tons nuancés, leur beauté princière.

Je trouvais beaux aussi ces paons au plumage d’un bleu qu’il est impossible de décrire tant il est lumineux, chatoyant et profond et cette queue dans des tons verts et violets qui lorsqu’elle se déploie semble vous regarder avec des yeux ronds sans regard, que j’avais vus au parc de Bagatelle lors d’une promenade au milieu de la verdure et des roses, un après-midi d’été. Ils semblaient aussi princiers ces oiseaux, royaux, vénérables comme d’antiques momies avec leur port altier, leurs yeux qui vous toisent, leur tête qui se lève et s’incline à chaque pas. Ils paraissaient jeter à la ronde un regard de souverain mépris laissant sous-entendre que vous n’étiez pas à leur hauteur, vous qui passiez dans ce lieu retiré parce qu’ils faisaient eux partie du paysage, étaient les dépositaires de sa beauté intangible. J’avais tenté de peindre leur robe de satin sur mon carnet, une nuit, et cet oiseau faisant la roue s’était métamorphosé en un arbre aux branches recouvertes de fleurs, à la ramure circulaire, les yeux du plumage avaient pris l’allure d’une floraison aux teintes pastel puis je l’avais posé sur mon piano définitivement abandonné en guise de partition florale.

J’aimais aussi me promener dans le parc zoologique du Jardin des Plantes, pour y contempler les oiseaux exotiques, les flamands roses, les aras, les toucans et les perruches. Je prenais un carnet à dessin et j’essayais de saisir une position, un envol, un essor. Parfois je reprenais mes dessins et recouvrais le papier de couleurs à l’huile. Les couleurs de ces oiseaux sont merveilleuses, vives et lumineuses et ressemblent à celles des fleurs. On dirait un bouquet de fleurs printanières, comme celles que je cueillais lorsque, enfant, je passais mes vacances dans le Jura, on dirait une explosion d’étincelles. Les flamands roses ont une couleur rose orangée comme celle de la nacre brillante dans une huître perlière et je passais des heures à les regarder se mouvoir, perchés pensivement tantôt sur une patte, tantôt sur l’autre, à essayer d’en faire le croquis, tandis que des familles passaient autour de moi. Les perruches, elles, d’un vert profond, assises sur une branche et enlacées comme des amoureux transis, se donnaient de petits coups de bec comme, semblait-il, pour s’embrasser et me faisaient l’impression d’être indifférentes aux « regards obliques des passants honnêtes ». Quant aux aras, bleus comme les mers du sud tandis que leur tête était d’un jaune orangé, leur beauté détonnait avec leur voix, si rauque, si éraillée que j’avais plaisir à les contempler mais non à les entendre contrairement au concert des oiseaux à ma fenêtre lorsque j’étais à la campagne, tel le choeur des Anges, à la ville, on ne l’entend pas, le chant des oiseaux est couvert par les bruits des voitures, par le trafic incessant, mais c’est si beau un oiseau, lorsqu’il fait entendre sa musique intérieure, sa voix, sa partition. Le chant de l’alouette des champs à l’aube qui grisolle, tirelire, turlute avec des trilles et des tremolos dans la voix comme dans le Saint-François d’Assise prêchant aux oiseaux de Liszt où les notes de musique très aiguës ruissellent comme l’eau d’une cascade et scintillent comme le miroir d’un étang, on les entend monter dans un mouvement ascendant puis redescendre comme des trains fantôme - on entend les répétitions et les dissonances d’une musique presque atonale – ce chant, je ne l’ai jamais entendu, comment serais-je poète ? Oui, comment peut-on être poète et citadin ?

Claire d'Orée

  • Tétanisante inertie
    28.05.2020 12:18
    procrastination ?
     
  • Larme...
    28.05.2020 12:17
    je pense que je voulais dire un truc spéciale... caché... intrigant :-)
     
  • Larme...
    28.05.2020 12:15
    bah en fait je ne sais même plus ce que voulais dire !! lol :-) en tous cas attristés prend ées :-)
     
  • Haïku doré
    26.09.2012 16:01
    Bon Jour, Ciel, Si je puis me permettre, en toute amitié: 5/7/5 Vaste champ d'épis - Mot de saison ...
     
  • Lettre par Aurore Dupin
    23.09.2012 10:27
    aurore Dupin est le vrai nom de George Sand, elle a envoyé cette lettre à Alfred de Musset... je vous ...